La Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a estimé, vendredi dernier que les droits de Khalifa Sall et Cie avaient été violés. Condamné fin mars à 5 ans de prison ferme dans l’affaire de la caisse d’avance de la mairie de Dakar, la défense du maire de Dakar avait saisi cette Cour qui a tranché en la faveur de leur client.
Thierno Bocoum, à travers une note qu’il avait publié le 27 octobre 2017 et qui rappelle cette « détention arbitraire » qui, selon l’ancien député « est une ignominie que nous devons combattre en toutes occasions et par tous les moyens« .
La cour de la cedeao vient de nous donner raison sur la levée de l’immunité parlementaire du député-maire Khalifa Sall.
Il est clair que nos remarques et contributions sont parfois vues sous une loupe partisane, mais elles s’adossent toujours sur des arguments justes et imparables.
La détention arbitraire est une ignominie que nous devons combattre en toutes occasions et par tous les moyens.
Levée de l’immunité parlementaire de Khalifa Sall: de la mascarade juridico-parlementaire !
Il est à la fois drôle et triste d’entendre parler de la levée de l’immunité parlementaire du député-maire Khalifa Sall. Ce dernier qui est en prison et dont les droits élémentaires sont aujourd’hui bafoués est la victime d’une justice qui cherche à sauver les formes. Quelqu’un qui dispose d’une immunité ne peut se retrouver en prison sans que les conditions de levée de son immunité ne soient remplies. Khalifa Sall qui fait l’objet d’une poursuite pénale est protégé par la loi qui lui accorde une immunité. L’article 51 du règlement intérieur de l’assemblée nationale est clair: le député est couvert par l’immunité à compter du début de son mandat qui prend effet dès la proclamation des résultats de l’élection législative par le Conseil Constitutionnel. Cette immunité signifie, en l’espèce, qu’il ne peut être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu’avec l’autorisation de l’assemblée nationale.
Dès la publication des résultats des élections législatives par le conseil constitutionnel, l’immunité du député Khalifa Sall devait être constatée et, le cas échéant, des mesures idoines devaient être prises pour respecter la loi dans un sens ou dans un autre.
Aujourd’hui, avec la demande de levée de l’immunité parlementaire du député Khalifa Sall, l’assemblée nationale sera obligée de constituer une commission ad hoc qui sera tenue d’entendre le député. Autrement dit, Khalifa Sall devra être extrait de sa cellule pour être présenté aux députés, certainement sous forte escorte. Et il sera reconduit à la prison après l’audition. Ce scénario juridico-politique inédit, est une violation flagrante et ignoble de l’immunité parlementaire d’un député. Le député doit se présenter libre. Son sort ne peut et ne doit être scellé à l’avance. Il revient à ses collègues et seulement à ses collègues, en plénière, de décider ou non de sa poursuite ou de son arrestation.
En réalité, cette affaire gérée d’une manière purement politicienne porte un coup grave à notre justice et à notre Etat de droit.
Macky Sall et son régime sont les seuls coupables de cette chasse aux sorcières. Emprisonner Khalifa Sall, envoyer Karim Wade en exil malgré une grâce en bonne et due forme sont des pratiques contraires à la bonne administration et au bon fonctionnement d’une justice qui malheureusement accepte d’être malmenée et téléguidée.
Aujourd’hui, les sénégalais ne se trompent plus de cibles. Tout le monde comprend que c’est Macky Sall qui est derrière l’emprisonnement de Khalifa Sall.
Son obsession de vouloir se faire réélire à tout prix et par tous les moyens le pousse à utiliser les méthodes d’une autre époque.
Éliminer un adversaire politique en téléguidant la justice est une véritable honte pour notre pays.
Ce Président a pourtant osé récemment s’inspirer de Nelson Mandela lors de son dernier voyage en Afrique du Sud, en ces termes : « La leçon de vie la plus importante qu’il faut retenir de l’apartheid, c’est cette capacité de dépassement et de pardon de Nelson Mandela ». Il ne lui est point demandé de pardonner ou de faire preuve de dépassement mais juste de respecter la loi et de garantir une bonne administration de la justice.
Toutes ces dérives qui portent atteintes à nos libertés fondamentales doivent cesser. Il faut les combattre à tout prix. Notre jeunesse doit se mobiliser pour ce combat.
Le recul démocratique dans notre pays, le peuple tout entier doit le refuser.
Il y va de la sauvegarde de notre Etat de droit.
Thierno Bocoum
Ancien député
Président du mouvement AGIR