Le comportement hostile et les propos tenus récemment par le Président Macky Sall à propos de la grâce qu’il doit accorder à Khalifa Sall, continent d’irriter les partisans de l’ancien maire de Dakar. Incarcéré dans le cadre du dossier de la Caisse d’avance de la Ville de Dakar, sa libération que la plupart des Sénégalais attendaient la veille de la Tabaski, n’a finalement pas été au rendez-vous. Au delà d’une prérogative constitutionnelle relevant du pouvoir discrétionnaire du chef de l’État, que représente la grâce présidentielle, le maintien de Khalifa Sall en prison s’explique autrement.
Dakar, le bastion de la discorde
Les résultats des élections qui se sont succédé depuis 2012, ont prouvé que la capitale reste une chasse gardée de Khalifa Sall. Une base départementale qu’il a acquise depuis 2009 et qui a fortement pesé sur la victoire du président de la République lors de l’élection de 2012. S’y ajoute son programme de désengorgement du quartier de Dakar-plateau et le recasement des marchands ambulants qui a bluffé les populations. Ainsi, jusqu’aux dernières joutes locales, Khalifa Sall contrôlait 15 communes sur les 19 que compte la ville de Dakar.
Délit d’ambition
Il faut rappeler que les déboires de l’ex maire de la capitale ont commencé lorsque, dépité par la boulimie de ses alliés « apéristes ». Il avait décidé de mettre en place la coalition « Taxawou Dakar » pour maintenir et consolider sa base politique. C’était en perspective de la Présidentielle initialement prévue en 2017, avant que le Président Macky Sall ne renonce à son quinquennat, sous le prétexte d’un avis du Conseil constitutionnel, lui donnant mandat à un septennat. Dans la même période, les prémisses d’une crise se manifestaient au Parti socialiste, alors que le défunt secrétaire général, Ousmane Tanor Dieng, avait déjà pris la décision unilatérale de soutenir la candidature du président de la République, pour sa réélection.
La caisse d’avance comme alibi
Khalifa Sall et beaucoup de ses camarades socialistes s’étaient retrouvés autour d’une même cause. « Pas question que le parti de Senghor devienne un mouvement de soutien pour quelque candidat ». Après avoir porté le candidat de Benno bokk yakaar au pouvoir, Barthélémy Dias, Bamba Fall, Idrissa Diallo, Cheikh Gueye et consorts ont voulu poursuivre la logique de conquête du pouvoir face à Macky Sall. Mais le dossier de la Caisse d’avance et surtout les scènes de violence survenues lors d’une réunion du Secrétariat national du Parti socialiste, collées à la bande à Khalifa Sall sont tombés comme un couperet. Pourtant, d’anciens maires, témoins du mode de gestion de la Caisse d’avance, ont tous reconnu que « rien n’a changé dans le management de ces fonds d’aides et de secours depuis 1950 ». D’ailleurs, la médiation pénale initiée par les amis, parents et proches de Khalifa Sall pour le remboursement du milliard huit cent millions de F Cfa représentant le montant de l’argent qu’il aurait détourné n’a pas été acceptée par le juge d’instruction qui semblait suivre au doigt et à l’œil une directive pour condamner et maintenir en prison un terrible challenger de l’Apr et de la coalition Benno bokk yakaar.
Le piège de la délivrance…
Malgré les médiations d’autorités religieuses, politiques et coutumières, le Président Macky Sall s’est arc-bouté à sa volonté de ne pas user de sa prérogative constitutionnelle afin que l’ancien maire de Dakar puisse retrouver sa vieille maman et les siens. « Si Khalifa Sall sollicite une grâce, je la lui accorderai volontiers », avait-il dit quelques jours avant la Tabaski. Une sortie que des compatriotes prenaient déjà comme une volonté dissimulée de l’élargir et qui avait suscité beaucoup d’espoir par rapport à la décrispation du climat politique. Mais, selon les partisans de l’ex maire socialiste, demander une grâce serait synonyme d’humiliation pour leur mentor qui doit rester digne, en purgeant sa peine jusqu’à terme. Il ne faudrait pas non plus tomber dans le piège d’une grâce qui n’efface pas le délit, en lieu et place d’une amnistie qui annule les faits reprochés à Khalifa Sall. Il y va de son éligibilité. Encore que tout protocole devrait être également exclu entre le pouvoir et celui que la plupart des leaders ont pris comme un otage politique.