L’ancien attaquant des lions du Sénégal a, dans un entretien accordé à SoFoot repris par Senego, indiqué qu’il était le leader de l’équipe nationale. Diouf a soutenu qu’il s’était mis une pression.
On t’a vu pleurer deux fois. La première lors de la finale de la CAN 2002 perdue aux tirs au but face au Cameroun, séance durant laquelle tu as manqué la cible. La seconde c’était après la défaite en quarts de finale de la Coupe du monde contre la Turquie.
La première fois, je pleurais parce que tout le bonheur qu’on donnait aux gens s’arrêtait. J’aurais préféré ne pas gagner mes Ballons d’or et amener la Coupe d’Afrique au Sénégal. Je garderai toujours ça en tête. Ça aurait été la cerise sur le gâteau. Contre la Turquie, c’est parce qu’on voulait être la première équipe africaine à atteindre les demi-finales, montrer à nos petits frères que c’était possible. D’ailleurs, je lance un appel à tous les Sénégalais pour qu’ils soient derrière cette équipe avant et pendant la Coupe du monde. Je demande aussi aux joueurs de rendre fier le Sénégal, leur famille et le continent africain.
On peut être un homme fier, fort et pleurer ?
Bien sûr. Même si on ne pleure pas par des larmes, on peut pleurer à l’intérieur.
Est-ce que, durant votre carrière, vous ne vous êtes pas mis trop de pression sur les épaules ?
Il fallait bien que quelqu’un dirige le bateau. Il fallait un leader technique et moral sur le terrain. Dès que les Sénégalais me voyaient jouer, ils croyaient que tout était possible. Je me suis mis cette pression, mais je l’aimais, je l’adorais.
Qu’est-ce qui vous a rendu le plus triste ?
La méchanceté des gens. Ceux qui te voient réussir et qui se disent : «Pourquoi lui et pas moi ?» L’hypocrisie aussi. Mais pour un incapable, il est normal de jalouser les autres. Je ne m’attarde pas sur eux, mais ça me révolte. Enfin, tu peux ressentir cela en toi et ne pas le montrer. Mais ce qui me fait le plus mal aujourd’hui, c’est ce qui s’est passé lors du tirage de la Coupe du monde. On voit Figo, Cannavaro, Maradona, Forlán, des légendes, mais aucun Africain. Il manquait Roger Milla, El-Hadji Diouf, Samuel Eto’o, Didier Drogba, George Weah, Salif Keita. C’est un manque d’élégance. Je pense que des joueurs comme Sadio Mané ou Mohamed Salah qui vont disputer la Coupe du monde auraient aimé pouvoir se dire que lorsqu’ils arrêteront, ils pourront participer à un tirage. Ce qui me fait mal, c’est que les Africains ne sont pas aussi bien vus que les Européens. Ils signent moins dans les grands clubs, on leur pardonne moins de choses sur un terrain de football. Mais c’est également à nous de nous unir. Si on ne l’est pas, on n’obtiendra jamais ce que l’on souhaite. On veut être sur le même pied que les autres. Il n’y avait personne pour représenter les noirs, l’Afrique. Tout le monde aurait dû s’unir pour dénoncer ça. Samuel Eto’o ou Didier Drogba auraient dû le dire, mais peut-être qu’ils ne le souhaitaient pas. C’est aussi la faute des Africains. Mawade Wade, un grand entraîneur disait : «La différence entre l’Europe et l’Afrique, c’est qu’en Europe, ils font et feront toujours en sorte que leurs héros soient respectés alors qu’en Afrique, on tue nos héros.»
Pourquoi l’Afrique tue-t-elle ses héros ?
À cause d’une jalousie bête, d’un manque d’éducation. L’un ne veut pas que l’autre avance. L’éducation, ce n’est pas seulement faire de grandes études. Sortir du Sénégal très tôt m’a aidé et il y a également le fait d’avoir appris une autre culture. Attention, je ne veux pas dire que notre éducation est mauvaise, mais l’éducation ne veut pas dire seulement mettre son fils à l’école coranique. L’éducation c’est le partage, la générosité, le travail, le respect.